La Commune de Paris par elle-même
Textes et déclarations des communards et communardes : la peine de mort ;
La Colonne Vendôme et le militarisme ; l'éducation ; l'organisation de la Commune ;
la production de biens pendant la Commune ; la vie des Clubs ; la condition des femmes ; l'organisation de la Garde Nationale ; les étrangers et la Commune
La peine de mort :
Le bataillon du XIè arrondissement est allé rue de la Folie Méricourt, il a réquisitionné la guillotine, il a brisé en morceaux la hideuse machine et aux applaudissement d'une foule immense , il l'a brûlée.
Il l'a brûlée au pied de la statue du défenseur de Sirven et de Callas , de l'apôtre de l'humanité ,
du précurseur de la Révolution française, au pied de la statue de Voltaire !
La Colonne Vendôme et le militarisme :
La Commune de Paris considère que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire , une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l'un des trois grand principes de la République : la fraternité !
L'éducation :
Les délégués de la société " l'éducation nouvelle " ont été reçu par les membres de la Commune et lu une déclaration.
A la commune de Paris,
Considérant la nécessite qu'il y a sous une république à préparer la jeunesse au gouvernement d'elle-même par une éducation républicaine qui est toute à créer.
Considérant que la question de l'éducation, laquelle n'est exclusive d'aucune autre, est la question mère qui embrasse et domine toutes les questions politique et sociales et sans la solution de la quelle il ne sera jamais fait de réformes sérieuses et durables.
Considérant que les maisons d'instruction et d'éducation entretenue par la commune, par le département ou par l'état doivent être ouvertes aux enfants de tous les membres de la collectivité, quelles que soient les croyances intimes de chacun d'eux.
Les soussignés, délégués de la société l'Education nouvelle, demandent d'urgence, au nom de la liberté de conscience, au nom de la justice. Que l'instruction religieuse ou dogmatique soit laissée toute entière à l'initiative et à la direction libre des familles et qu 'elle soit immédiatement et radicalement supprimée pour les deux sexes, dans toutes les écoles, dans tous les établissements dont les frais sont payés par l'impôt.
Que ces maisons d'instruction et d'éducation ne contiennent aux places exposées aux regards des élèves ou du public aucun objet de culte, aucune image religieuse.
Qu'il n'y soit enseigné ou pratiqué, en commun, ni prières, ni dogmes, ni rien de ce qui est réservé à la conscience individuelle.
Qu'on n'y emploie exclusivement que la méthode expérimentale ou scientifique, celle qui part toujours de l'observation des faits, quelle qu'en soit la nature physiques, moraux, intellectuels.
Que toutes les questions du domaine religieux soient complètement supprimées dans tous les examens publics et principalement dans les examens pour brevets de capacité.
Qu'enfin les corporations enseignantes ne puissent plus exister que comme établissements privés ou libres.
La qualité de l'enseignement étant déterminée tout d'abord par l'instruction rationnelle, intégrale qui deviendra le meilleur apprentissage possible de la vie privée, de la vie professionnelle et de la vie politique ou sociale. La société l'éducation nouvelle émet en outre le voeu que l'instruction soit considérée comme un service public de premier ordre qu'en conséquence, elle soit gratuite et complète pour tous les enfants des deux sexes à la seule condition du concours pour les spécialités professionnelles.
Enfin, elle demande que l'instruction soit obligatoire en ce sens qu'elle devienne un droit à la portée de tout enfant quelle que soit sa position sociale et un devoir pour les parents ou pour le tuteurs ou pour la société.
Les délégués nommés dans la séance du 26 mars 1871 à l'école Turgot : Henriette Garoste ; Louise Lafitte ; J. Manier ; J Rama ; Rheims ; Maria Verdure "
J'étais tout particulièrement concernée par la réforme de l'enseignement qu'entreprenait la Commune sur des bases très saines : respecter la conscience de l'enfant, en faire un citoyen responsable, capable d'aimer ses semblables, lui inspirer l'amour de la justice. C'étaient aussi les buts que je m'efforçais d'atteindre dans ma classe depuis de longues années. Je n'ai pas pu faire partie de la commission de l'enseignement, car je me trouvais sur les remparts. Mais Elle faisait beaucoup appel aux facultés visuelles des enfants et refusait les punitions et les récompenses, le sentiment du devoir accompli devant suffire ".
Louise Michel - Mémoires
Sur l'organisation de la commune.
Le Manifeste du comité des vingt arrondissements
La commune est la base de tout de tout état politique...
Elle doit être autonome , c'est à dire se gouverner et s'administrer elle-même... L'autonomie de la commune garantit au citoyen, la liberté, l'ordre à la cité, et la fédération de toutes les communes augmente par la réciprocité, la force, les débouchés et les ressources de chacune d'elle en la faisant profiter des efforts de toutes.
Elle implique, la liberté la plus complète de parler, d'écrire de se réunir et de s'associer ; le respect de l'individu et l'inviolabilité de sa pensée la souveraineté du suffrage universel, restant toujours maître de lui-même et pouvant se convoquer et se manifester incessamment le principe de l'élection à tous les fonctionnaires et magistrats la responsabilité des mandataires et par conséquent leur révocabilité permanente le mandat impératif, c'est à dire précisant et limitant le pouvoir et la mission du mandataire ...
Citoyens, vous êtes maîtres de vos destinées ; forte de votre appui la représentation que vous d'établir va réparer les désastres causés par le pouvoir déchu. L'industrie compromise, le travail suspendu, les transactions commerciales paralysées vont recevoir une impulsion vigoureuse. Dès aujourd'hui la décision attendue sur les loyers, demain celle sur les échéances.
Tous les services publics rétablis et simplifiés.
La garde nationale, désormais seule force armée de la cité, réorganisé sans délai. Tels sont nos premiers actes.
Les élus du peuple ne lui demande, pour assurer le triomphe de la République que de les soutenir de votre confiance. Quant à eux , ils feront leur devoir
La Commune de Paris , le 28 mars 1871
Dessin de couverture du livre : Le Cri du Peuple (Tardi Vautrin) Edtion Casterman.
Sur la production de biens pendant la Commune
La commune de Paris décide : Réquisition après inventaire indemnité ultérieure, fixée par des experts, de tous les grands ateliers des monopoleurs, de leurs outils , machines matières premières, agencement locaux, etc.
la cession provisoire de ces ateliers aux associations ouvrières qui en feront la demande l'adjudication des fournitures de la Commune à ces associations ouvrières l'ouverture d'un crédit à ces associations. Les "ateliers du Louvre" qui fabriquaient de l'armement, furent une des réalisations de ces réquisitions.
Les "dirigeants" du conseil ouvrier, chefs d'ateliers, chefs de bancs, etc. étaient élus par les ouvriers de chaque section et révocable à tous moments.
La vie des Clubs :
Créés avec l'avènement de la République, Ils se multiplièrent sous la Commune. Les églises furent transformées en lieux ouverts à tous et toutes. Il fonctionnaient selon la formule de la démocratie directe : Un président et deux assesseurs élus par séance. Ce sont eux par exemple qui demandèrent la destruction de la " colonne Vendome ", monument à la gloire du despotisme et de la guerre.
" Il est temps d'en finir avec le vieux monde pourri et corrompu qui vit à nos dépends. Il faut que le travail soit maître ! vainquons et proclamons universellement que celui qui ne produit pas ne doit pas consommer et notre œuvre splendide et grandiose sera reçu comme la délivrance ".
club de la révolution (église St Bernard XVIIIè)
" C'est avilir l'homme et la femme que de s'en servir comme esclave. Un autre vice de la société actuelle, ce sont les riches, qui ne font que bien boire et bien s'amuser sans prendre aucune peine.
Il faut les extirper, ainsi que les prêtres et les religieuses. Nous ne serons heureuses que nous n'aurons plus ni patrons, , ni riches ni prêtres ! "
" La plaie sociale qu'il faut d'abord fermer c'est celle des patrons qui exploitent l'ouvrier et s'enrichissent de ses sueurs. Plus de patrons qui considèrent l'ouvrier comme une machine de produit. Que les travailleurs s'associent entre eux qu'ils mettent leurs labeurs en commun."
club de la délivrance (église de la Trinité)
" Je sui athée, socialiste et révolutionnaire. Athée, parce qu'en fouillant les anales des peuples de l'univers, en considérant les événements contemporains, j'ai constaté que chaque fois qu'on avait eu du sang à verser, une grande iniquité à commettre, on s'était abrité derrière une divinité quelconque".
club des libres penseurs
Ce vertige fratricide qui s'empare de la France, ce combat à mort, c'est l'acte final de l'éternel antagonisme du droit et de la force, du travail et de l'exploitation, du peuple et de ses bourreaux !
Nos ennemis, ce sont les privilégiés de l'ordre social actuel, tous ceux qui ont toujours vécu de nos sueurs, qui toujours se sont engraissés de notre misère. Nous voulons le travail, mais pour en garder le produit. Plus d'exploiteurs, plus de maîtres !
Club de la délivrance : 11 avril 1871
La condition des femmes
Citoyen Maire, Notre comité voulant prendre sa part de la Tâche patriotique, nous demandons : Un pouvoir de requérir immédiatement les maisons abandonnées du XVIIIè arrondissement afin d'y loger les citoyens sans abri et d'y établir les asiles où les enfants seront nourris. Ainsi la République ne sera pas trompée. Que le vin et le charbon laissés dans les caves des maisons abandonnées puissent immédiatement servir aux besoins des malades et des infirmes. L'abolitions complète dans le XVIIIè des pouvoirs religieux et des maisons de prostitution. La fonte des cloches de Montmartre pour les canons.
Comité de vigilance des femmes du XVIIIè dont faisait partie Louise Michel
En matière de séparation de corps, le tribunal pourra allouer à la femme demandant la séparation une pension alimentaire qui lui sera servie jusqu'à ce qu'il en soit décidé autrement par un autre tribunal.
Que la Commune représentante du grand principe proclamant l'anéantissement de tout privilège, de toute inégalité, par la même est en gagée à tenir compte des justes réclamations de la population entière, sans distinction de sexe -distinction créée et maintenue par le besoin de l'antagonisme sur lequel repose les privilèges des classes gouvernementales
La Garde Nationale :
Aux Gardes Nationaux du VIè arr.:
Toute armée permanente est destructive des institutions républicaines. Elle ne peut que conduire le pays tantôt à d'effroyables désastres, tantôt à la gloire militaire s'élevant toujours sur la ruine des libertés et l'oppression des autres Peuples. Elle sert à écraser le pays d'impôts, à entraver la production en consomant sans produire. L'armée permanente prend des hommes et rend des esclaves.
La garde Nationale ne peut sans trahir conserver le commandement à des chefs imposés.
Elle doit obéïr qu'aux chefs choisis par elle et constamment révocables.
Eugène Varlin, Henri Verlet, Jules Bergeret, V. Frontier, H. Chouteau, L. Laccord
Sur l'organisation de la Garde Nationale
La République est le seul gouvernement possible, elle ne peut être mise en discussion.
La garde Nationale a droit absolu de nommer tous ses chefs et de les révoquer dès qu'ils ont perdu la confiance de ceux qui les ont élus, toute fois après une enquête préalablement destinée à sauvegarder les droits de la justice.
La fédération républicaine de la Garde nationale est organisée ainsi qu'il suit :
l'assemblée générale des délégués
le cercle de bataillon
le conseil de guerre et le comité central *
l'Assemblée générale est formée : D'un délégué élu à cet effet dans chaque compagnie sans distinction de grade. D'un officier par bataillon élu par le corps des officiers. du Chef de chaque bataillon Ces délégués quel qu'il soit sont toujours révocables par ceux qui les ont nommés
le Cercle de bataillon est formé de trois délégués par compagnie sans distinction de grade. De l'officier délégué à l'assemblée générale. Du chef de bataillon.
Le conseil de légion est formé : de deux délégués par compagnie sans distinction de grade. Des chefs de bataillon de l'arrondissement.
le comité central est formé de deux délégués par arrondissement, élus sans distinctions de grade par le conseil de légion. D'un chef de bataillon par légion, élus par ses collègues.
Les réunions de l'assemblée générale auront lieu les premiers dimanches du mois, sauf urgence.
Paris le 20 mars 1871
La conscription est abolie !
Aucune force militaire autre que la garde nationale ne pourra être créées ou introduite dans Paris. Tous les citoyens valides font partie de la garde nationale
La Commune de Paris le 29 mars 1871
Le Peuple de Paris aux soldats de Versailles FRERES !
L'heure du grand combat des Peuples contre leurs oppresseurs est arrivée !
N'abandonnez pas la cause des travailleurs ; faites comme vos frères du 18 mars !
Unissez-vous au Peuple, dont vous faites partie ! Laissez les aristocrates, les privilégiés, les bourreaux de l'Humanité, se défendre eux-mêmes et le règne de la Justice sera facile à établir.
Quittez vos rangs ! Entrez dans nos demeures, venez à nous au milieu de nos familles. Vous serez accueillis fraternellement et avec joie.
Le Peuple de Paris a confiance en votre patriotisme.
Vive la République , Vive la Commune !
2 prairial an 79 la Commune de Paris
les affiches de la Commune
Les étrangers peuvent-ils être admis à la Commune ?
Considérant que le drapeau de la Commune est celui de la République universelle ; considérant que toute cité a le droit de donner le titre de citoyens aux étrangers qui la servent. Que cet usage existe depuis longtemps chez les nations voisine .
Considérant que le titre de membre de la commune étant une marque de confiance plus grande encore que le titre de citoyen , comporte implicitement cette dernière qualité.
La commission est d'avis que les étrangers peuvent être admis.
La commission propose l'admission du citoyen Léo Frankel.
Paris le 30 mars 1871
Commentaires : de très nombreux étrangers participèrent à la Commune. Des Belges (dont Léo Frankel), des Polonais (dont Dombrowski qui fut membre de l'Etat major de la Commune), des Garibaldiens, des Russes comme Elisabeth Dmitrieff qui fonda l'union des femmes, etc.