A la veille d'une manif' devant la maison d'arrêt de Fresnes, quelques temps après la tentative d'évasion de mai 2001.

C’est en 1978, avec Nathalie Ménigon, Joëlle Aubron et Georges Cipriani que Jean-Marc Rouillan fonde l'organisation communiste révolutionnaire Action Directe. Il s'agit de combattre concrètement « le système capitaliste et de promouvoir l'organisation de la classe prolétarienne et sa stratégie opérationnelle : la lutte armée » (J. Aubron). La première action revendiquée par l'organisation : mitraillage du siège du patronat français, le 1er mai 1979.
Incarcérés avec ses camarades depuis quatorze ans pour plusieurs attentats et assassinats, notamment celui de Georges Besse, PDG de Renault, J.-M. Rouillan a passé ses sept premières années d'incarcération à Fresnes, dans un isolement total. Pour G. Cipriani le traitement s'est terminé à l'asile psychiatrique, N. Ménigon connaît de très graves problèmes de santé, notamment cardio-vasculaires. J.-M. Rouillan résiste toujours : « J'écris pour ne pas crever, par peur de la mort lente et de la gangrène amnésique qui pourrit toute une génération. J'écris depuis le quartier d'isolement, mon propre rythme doit être plus rigoureux que la torture blanche elle-même. » Il a écrit clandestinement, au cours d'une grève de la faim à la centrale de Lannemezan et terminé au crayon, à l'hôpital de Fresnes, à la fin de l'année dernière, ce texte…
L e 22 novembre 2000, 16 heures, je débarquais « en disciplinaire » au QI (Quartier d’isolement) de Fresnes. Je connaissais bien l'endroit puisque j'avais déjà survécu plus de sept ans au rez-de-chaussée de la première division de cet établissement « mythique » de la discipline pénitentiaire. Quelques semaines plutôt, j'avais lu le compte rendu de la visite des sénateurs. Selon eux, tout allait bien. Rien à signaler. Sauf peut être qu'il était essentiellement peuplé de « pointeurs » (délinquants sexuels). Mon retour à la case départ était ainsi l'occasion de faire le point sur l'isolement contre lequel j'ai mené, depuis 1997, plusieurs longues luttes (grèves de la faim, blocages, grève des plateaux...).
Le QI de Fresnes est un quartier de 19 cellules spéciales, situé au bout de la première Division Sud. Un bureau pour les surveillants, en face une cellule grossièrement équipée en parloir pour les avocats et visiteurs accrédités (le parloir famille est commun avec le reste de la détention). Une douche. Et enfin, une cellule « activités » aujourd'hui transformée en petite salle de musculation.
Les cellules sont spacieuses, elles ont exactement la même dimension que les cellules normales prévues pour 3 ou 4 détenus. 2,50 m sur 5. L'équipement intérieur date du vieux QHS (Quartier haute sécurité) : armoire en béton, lit scellé au sol, grille intérieure à la porte, double barreau et double grillage à l'unique fenêtre, de type vasistas, ouverte à 2m du sol. De ce fait et à l'exception de deux heures par jour et encore les jours de beau temps, la lumière électrique est obligatoire. Les détenus vivent en permanence dans la pénombre.
Onze cours de promenades constituent le secteur strictement rattaché au QI et entièrement isolé du reste de la détention. La promenade type est de dimensions très restreintes : 2m de large environ sur 8-10 de long. Cinq cours sont « doublées ». En fait, elles ont conservé les dimensions premières des cours de Fresnes soit 4m sur 8-10m. Toutes sont couvertes d'un grillage très dense en tôle étirée. Encaissées entre deux hauts bâtiments, il est rare que le soleil les atteigne en dehors des mois de juillet et août.
Informations tronquées
Huit mois après la visite de la commission, il faut constater que le QI est plein comme un œuf. Seize ou dix sept détenus en permanence. Les détenus déjà anciens dans les lieux et à qui j'ai pu parler m'ont affirmé que la situation perdurait ainsi depuis des mois et des mois. Et ils ne comprenaient absolument pas comment la commission en était arrivée au chiffre de dix pensionnaires ! A la fin des années 80 et au début des années 90, ce qui est communément dénommé, à tort ou à raison, les pires années de l’isolement, le nombre d'isolés à Fresnes ne dépassait jamais sept, huit personnes. A ce moment là, c'était compréhensible, vu que les cellules à droite du grand couloir étaient réservées aux grévistes de la faim, donc forcément il y avait beaucoup moins de cellules disponibles pour le traitement spécial. Maintenant toutes les cellules sont occupées ou peu s'en faut. Lors de mes trois débarquements inopinés au QI durant cette période, le 22 novembre donc, mais aussi le 12 janvier et le 9 février, à chaque fois, j'ai bouclé l'effectif en occupant la dernière cellule disponible.
Maintenant il faut se poser la seconde question : les pointeurs et les isolés à leur demande constituent-ils la grande majorité comme le laisse croire la commission ?
Bien sûr, bon nombre de détenus ne parlent jamais donc on ne sait pas pourquoi ils sont là et si c'est à leur demande ou non et pour quel délit ils sont emprisonnés... Pourtant parmi ceux avec qui j'ai pu communiquer et que, pour certains, je connaissais déjà, circuit des QI oblige, au moins cinq condamnés définitifs ou détenus en préventive étaient là parce que soupçonnés de tentative de cavale (bien évidemment souvent sans le moindre début de preuve). Deux détenus étaient des condamnés transférés disciplinairement à la suite de mouvements de lutte. Un détenu était condamné pour l'assassinat d'un flic. Et enfin un détenu était isolé à sa demande mais condamné pour une affaire de banditisme. Sur ces neuf locataires, pas un pointeur et un seul isolé à sa demande.
On est obligé de dire que si, dans certains domaines, les deux commissions parlementaires ont fait un honnête travail d'enquête, face à l'isolement elles se sont contentées de prendre pour argent comptant les informations tronquées quand elles n'étaient pas falsifiées, délivrées par l'AP (Administration Pénitentiaire). Pourquoi l'isolement total, essentiel au fonctionnement de la prison actuelle, a-t-il été aussi banalement mis de côté par les enquêteurs ? Pourquoi la « torture blanche » à l'usage des juges pour affaiblir les prévenus ou la menace disciplinaire permanente n'ont pas été abordés ni condamnés aussi fermement que d'autres aspects du carcéral actuel ? Quant aux députés, ils évoqueront évasivement et sans aller plus loin les ravages occasionnés par ces traitements en citant un texte de psychiatres pénitentiaires. Rien de plus. Comme si l'isolement était accepté, légitime, pire qu'il était un traitement périphérique à la prison et non son cœur répressif.
 
Idéologie du contrôle total
 
Mais concrètement, où en est le régime d'isolement en ce début de millénaire ?
Au-delà des conséquences destructrices de l'isolement, une première constatation s'impose sur sa structuration actuelle : un état des lieux est très difficile à établir car de nos jours le cancer qu'il représente dans le carcéral « moderne », a diffusé ses métastases à toutes les formes de détention, des maisons d'arrêt aux centrales et même dans les centres de détention. Il est sorti des QI « traditionnels » eux-mêmes pour fleurir sous les formes modulées de petites structures configurées entre le QI et le SMPR (Service médico-psychiatrique régional).
L’isolement assume désormais une figure complexe de plus en plus essentielle à la gestion carcérale globale. En outre, on peut identifier dans l'isolement l'idéologie dominante du contrôle total et de la tolérance zéro : la menace disciplinaire pour l'immense majorité de la population pénale (voir le nombre de participants à des mouvements de protestation qui y font de longs séjours), la prévention sécuritaire contre la simple possibilité de l'évasion (forme de remise en cause de l'autorité de la justice selon le nouveau code), contre la rébellion à la discipline, mais aussi pour les prévenus le chantage à l'aveu, à la dénonciation des complices...
Concrètement, il est possible d'écrire aujourd'hui qu'il y a autant sinon plus d'isolés hors des QI que dans le circuit lui-même du traitement spécial. A partir de là, la revendication démocratique des prisonniers ne doit pas rester figée à l'abstrait mot d'ordre de « fermeture des QI ». Elle doit être le résultat d'une enquête sur le traitement spécial d'isolement tel qu'il existe. En 1981, l'isolement a survécu à la fermeture des QHS. Si nous parvenions à imposer la fermeture des QI, il faut savoir qu'une alternative répressive est déjà en préparation et en expérimentation. Si nous ne l'anticipons pas, l'isolement se perpétuera inexorablement.
A partir de mon bref retour dans le circuit des QI, je peux faire deux autres constations toutes aussi évidentes qu'essentielles :
Tout d'abord, lors de mes passages à Fresnes et lors du mois passé au QI de la centrale de Saint Maur, j'ai perçu l'évidence : le nombre croissant des isolés. Cette constatation recoupe celles faites à partir de l'évolution du QI de la centrale de Lannemezan. Pratiquement vide au début des années 90, et ne servant qu'à l'observation des arrivants depuis 95 plus d'une dizaine de prisonniers y demeuraient en permanence (d'ailleurs de plus en plus souvent les arrivants n'y trouvaient plus de place et devaient être affectés au rez-de-chaussée d'un autre bâtiment). Vu l'état de surpopulation de la détention normale dans les maisons d'arrêt, il peut être compréhensible que certains détenus demandent à être isolés. Dans les centrales, ce problème n'existe pas. Toutes ont un régime de cellule individuelle. D'ailleurs, dans ces centrales, nous connaissons nombres de détenus qui s'auto-isolent 24h sur 24 dans leur propre cellule. Le plus souvent ils ont perdu ou alors ils perdent progressivement la raison. Il faut des années et des années avant que l'administration ne s'en aperçoive ou feigne de l'apprendre. Le QI de Saint-Maur est une immense galerie d'une cinquantaine de cellules dont une majorité était occupée. Il y avait là plus d'une dizaine de détenus isolés depuis plusieurs mois, plusieurs années. Des détenus connus pour leurs évasions spectaculaires ou leurs tentatives mais aussi des malades psychiatriques. A partir de cette constatation à Fresnes, Lannemezan et Saint-Maur, peut-on croire un seul instant au chiffre de 57 détenus isolés depuis plus d'un an donné par l'AP à la commission de l’assemblée nationale ?
Un territoire sans contours
Quels sont aujourd'hui les chiffres exacts de l'isolement en France ? Il faut immédiatement ajouter que l'impossibilité d'apporter une réponse même approximative est liée à l'isolement lui-même, qui est « mise au secret ». Pour son efficacité, il faut qu'il dessine ce no man's land. Un territoire sans contours, sans réalité chiffrée, le prisonnier n'est même plus un numéro. Là, il n'est plus rien. Seconde constatation évidente : il y a de plus en plus de cas psychiatriques dans les QI. Aujourd'hui, l'AP a pris l'habitude d'isoler au QI ou au mitard les détenus ayant des problèmes psychiatriques, plus ou moins graves.
- Comme nous constatons depuis des années qu'il y a de plus en plus de prisonniers atteints de troubles après de longues détentions,
- comme le système psychiatrique actuel reconnaît de moins en moins l’irresponsabilité pénale des malades psychiatriques ayant commis des délits et des crimes,
- comme il n'y a pratiquement plus de libération médicale pour raison psychiatrique,
selon la logique gestionnaire de l'AP, il est tout à fait normal d'en trouver de plus en plus dans les QI. Certains malades y séjournent entre deux placements en hôpital psychiatrique, d'autres sont abandonnés ainsi des années et des années dans le circuit des QI sans aucun soin spécifique.
Petite parenthèse. Un des très rares changements que j'ai noté dans la configuration du QI de Fresnes est un dispositif à la porte d'une cours de promenade, un petit espace dans lequel le détenu glisse ses mains afin qu'elles soient menottées. L'opération se répète à la sortie des cellules et des promenades. Menottes devant ou dans le dos. Ainsi certains détenus psychiatriques sont gérés comme des condamnés à mort américains.
Et enfin troisième constatation, l'administration ne respecte pas les circulaires régissant l'isolement. Loin de trouver une amélioration sensible à la détention isolée de Fresnes, j'ai constaté de nombreuses régressions. Au cours des années, nous avions imposé le droit de sortir en promenade au moins deux par deux. Les non-DPS (Détenu particulièrement surveillé) sortaient à quatre et même cinq. Aujourd'hui, et cela en contradiction avec les circulaires l'isolement est à nouveau un isolement total. Seul en promenade. Dans le quotidien, l'isolement est renforcé car, vu le nombre d'isolés, deux tours de promenade ont été instaurés. Ainsi, la direction a la possibilité d'isoler des détenus entre eux au sein même du QI, ce qui ne pouvait être le cas avant car nous arrivions finalement à communiquer de cour a cour.
 
Situations critiques
Mais ces deux tours entraînent également une diminution du temps de chaque promenade. Ce qui constitue bien évidemment une punition discriminatoire par rapport à la détention normale. En moyenne, à Fresnes, les isolés perdent ainsi plus d'une heure de promenade par jour. Donc moins de socialité encore.
Là encore, il y a autant de régimes d'application des circulaires qu'il y a de QI. Des situations sont critiques, par exemple au QI de Tarbes, où le régime de détention demeure identique à celui de la vieille époque des QHS (interdiction de parler aux fenêtres et dans les cours de promenade, isolement total, agressions physiques des surveillants, régime quotidien drastique, obligation de plier les couvertures et les draps chaque matin... ).
Loin d'être en régression, l'isolement est en progression dans les prisons françaises et sous diverses formes il est le pivot de la gestion carcérale. Comme tel, il nécessite toujours plus d'institutionnalisation et de normalisation. Par le passé, seule une poignée de militants politiques et de rebelles supportait des traitements spécifiques en dehors de tout cadre réglementaire et souvent dans l'illégalité complète. L'urgence anti-terroriste faisait taire les velléités humanitaires et les critiques des défenseurs de l'état de droit. Aujourd'hui des textes existent, il faut le reconnaître. Nos luttes n'avaient pas ce but mais elles ont imposé ce compromis et fait reculer d'une certaine façon la pression de la « torture blanche ». Pourtant après des années on est obligé de constater que les textes sont le plus souvent détournés et peu appliqués. Finalement, ils n'apportent que la légalité à la torture blanche sous le prétexte d'en régir l'application. Tout cet encadrement légal se résume à la fonction de cache-sexe de l'arbitraire et du manque de transparence. La torture est toujours la torture, institutionnalisée, balisée, mais toujours aussi destructrice.
Jean-Marc Rouillan
En mars 2001, depuis la Centrale (prison) d’Arles

Paroles de détenus
« Dehors, l’air n’est pas
le même qu’ici »
Quatre détenus parlent de leur vie en prison et de leurs rêves, du dedans et du dehors. Ils confient : « Mieux vaut ne compter que les années qui passent, les jours ce serait trop long ». Mais ils s’accrochent à cette même certitude : « Un jour viendra ». Ce jour, c’est celui de leur libération, lorsque les portes du centre de détention de Loos s’ouvriront pour les laisser partir.
Dedans
- Au bout d’un certain temps, on reste replié sur soi-même.
- En prison, on est dépendant de tout le monde et pour tout.
- Il y a des jours où il y a des coups de cafard. Ça ne peut pas toujours aller, sinon ce ne serait pas la prison, ça serait le Club Med, comme les gens le croient à l’extérieur. Qu’ils viennent un peu à notre place et on va voir.
- On n’est pas heureux parce qu’on a Canal + en cellule.
- Dedans c’est les galères. Quand il n’y a pas d’argent, des fois on n’a rien à manger. Dormir avec la faim, ça m’est déjà arrivé plusieurs fois.
- En prison, il est difficile de trouver un lieu d’expression, un lieu d’écoute. On a peur de lasser l’autre avec ses états d’âme.
- Moi quand ça va pas je prends un stylo, je fais couler l’encre, et ça va mieux.
Familles
- Ça rassure de savoir qu’il y a des gens à l’extérieur qui seront là pour nous accueillir.
- Quand les familles viennent, on leur dit que tout va bien, même si ça va pas. Si on leur dit que ça va pas, ils vont repartir en sanglots, pas bien. Nous, c’est malheureux à dire, mais on est rodés. Ça ne nous touche même plus, quoiqu’il se passe.
- Les familles ont un rôle très important. Elles apportent des nouvelles fraîches. On a le parloir deux fois par semaine, le samedi et le dimanche, 4 heures en tout. Les parloirs montrent qu’on est important. Les indigents, qui n’ont pas de parloir, pas d’argent, pour eux c’est plus dur.
- La famille c’est ce qui passe avant tout. C’est grâce à elle que j’ai le sourire.
- Ma femme et mes deux enfants viennent tous les dimanches, s’ils ne venaient pas ça serait très dur. C’est moi qui suis en prison, mais je sais qu’il y a une souffrance, une absence. Si je suis sanctionné, ils le sont également.

> La prison de Mauzac, une expérience unique
> Généalogie de la prison moderne
> L'isolement est une torture institutionnalisée
> L'illusion des peines alternatives
> On ne peut pas améliorer les prisons

Sortir
- C’est un rêve. Au début je l’ai haïe, mais plus elle approche, plus je l’aime. Je suis impatient d’être dehors.
- C’est un mot magique. Tous les jours on en parle. On s’imagine. Quand il fait beau, on s’imagine sur la plage.
- La sortie, c’est le bon sens. J’espère que ce ne sera pas un sens giratoire. Pour l’instant, c’est un sens obligatoire, mais ça fait aussi un peu sens interdit. J’attends, je tourne en rond.
- La sortie, ça se prépare avec les permissions. Heureusement qu’il y a les perms. La première fois que je suis sorti, ça m’a fait un choc. Tout avait évolué, ça allait trop vite dehors. Euralille ça n’existait pas, le Zénith ça n’existait pas quand je suis entré en prison. Dans mon quartier, les jeunes avaient grandi, tout avait changé. Moi aussi, en quatre années j’avais changé. Si j’avais pas changé, c’est que j’avais rien compris.
Travailler
- J’ai peur de moi-même face à l’extérieur. A l’intérieur, ça permet de réfléchir aux conneries qu’on a pu faire, d’essayer d’y remédier et de préparer la sortie. Le plus important pour moi est de faire le point sur moi-même. Mon angoisse, ce qui me fout la trouille, c’est de me retrouver à l’extérieur avec l’étiquette prison sur le front, vis-à-vis d’un employeur éventuel. C’est facile de rentrer, c’est plus difficile de sortir. Personne n’est à l’abri, tout le monde peut y entrer.
- On se balade avec une étiquette après, il y a un label. La réinsertion doit être mieux préparée.
- Tout ce qu’on peut faire ici, c’est entrouvrir les portes. Peut-être elles se refermeront à l’extérieur, mais on a peut-être une chance de s’immiscer.
Partir
- A cause du regard extérieur, je souhaiterais m’exiler.
- Une fois dehors, je veux aller en Normandie, quitter Lille, ne plus avoir les mêmes fréquentations, changer de vie. Faire une croix sur le passé, changer de futur.
- Pour moi, c’est plutôt ici l’exil. Quand je sortirai, ce sera la fin de l’exil.
Rêver
- Je rêve des vacances, être sur la plage, s’allonger et fermer les yeux.
- Aller au Maroc, deux trois mois, prendre la couleur et l’air. L’air à l’extérieur n’est pas le même qu’ici.
- Une porte qui s’ouvre, ma famille qui m’attend derrière, et un boulot.
- Pouvoir oublier tout ça, se dire que c’est du passé, mais je crois que ce n’est pas possible.
Le premier moment
- La porte franchie, trouver un troquet pour boire selon l’heure de la journée un bon café ou une bière bien fraîche.
- Après la bière bien fraîche, je voudrais un grand espace, avec l’horizon, ne plus être dans un étau.
- La première chose que je fais, je prends une chambre d’hôtel avec ma copine, et on fait l’amour. C’est la chose dont on est privé et qui manque le plus.
Propos recueillis
par Christine Renaudat et Sylvain Marcelli
Ces témoignages sont des extraits de l’émission « Ma ville est le plus beau park », réalisée en direct du centre de détention de Loos pour Radio Campus en 1998.